Le Guide de bonnes pratiques sur la planification territoriale et le développement durable, qui s’inscrit dans la Stratégie de soutien de l’agriculture urbaine, est enfin disponible. 100º en discute avec Jean-Philippe Vermette.
Le 7 juillet, sans tambour ni trompette, le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH) et le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) annonçaient la publication de ce guide promis depuis trois ans déjà. Mais l’attente n’aura pas été vaine. Jean-Philippe Vermette, Directeur interventions et politiques publiques au Laboratoire sur l’agriculture urbaine (AU/LAB), l’applaudit, car, à ses yeux, le guide est très bien fait. « Il est complet, précise-t-il. Il recense des exemples d’un peu partout au Québec. Toutes les notions sont bien exposées, références à l’appui. On ne dénote aucun oubli majeur. Je suis vraiment satisfait. »
Cet ouvrage de référence, dont l’exhaustivité justifie sa centaine de pages, a pour but de soutenir la culture et l’élevage en milieu urbain pour favoriser la distribution de sa production et encourager les réseaux d’agriculture urbaine. Le document compte cinq chapitres principaux dont les titres offrent un excellent aperçu du tour du jardin :
- Les notions en agriculture urbaine
- Les avantages et les défis de l’agriculture urbaine
- Une démarche d’intégration de l’agriculture en milieu urbain
- La boîte à outils
- Les fiches de bonnes pratiques
Destiné aux municipalités, aux municipalités régionales de comté et aux communautés métropolitaines, le guide se distingue en outre sur le plan de la forme. « On sait que ceux qui vont le lire, ce sont des fonctionnaires, des agents des municipalités et des directions de santé publique, souligne Jean-Philippe Vermette. Or, le vocabulaire employé dans le guide est adéquat ! Son ton est bon ! Ce n’est pas mon habitude, mais, sincèrement, je ne vois pas quelle critique je pourrais formuler à son encontre. »
Lettres de noblesse
Tout aussi notable est le fait, pour Jean-Philippe Vermette, que ce guide soit le fruit d’une initiative du gouvernement. Quand on lui demande si cet important jalon confirme l’arrivée à maturité de l’agriculture urbaine, il adopte une position plus nuancée. « Je ne dirais pas à maturité, mais on est rendu loin. Non seulement on compte de plus en plus de regroupements partout au Québec, mais davantage de villes, petites ou grandes, souhaitent désormais en favoriser la pratique. Par exemple, la Ville de Montréal vient d’embaucher un professionnel au bureau de la transition écologique pour travailler à la planification d’une stratégie d’agriculture urbaine. C’est un signe que ça commence vraiment à percoler à travers les différents paliers de gouvernance. »
Le document a aussi le mérite de clarifier un point longtemps demeuré flou concernant les instances à qui revient la responsabilité de l’agriculture urbaine. « Le guide est sans équivoque, fait remarquer Jean-Philippe Vermette. Maintenant, c’est bien défini. L’agriculture urbaine, c’est de juridiction et de compétence municipales. Le MAMH et le MAPAQ envoient désormais un message clair aux municipalités : voici ce que vous pouvez faire pour développer l’agriculture urbaine sur vos territoires et nous serons là pour vous accompagner si vous avez besoin d’aide. »
La spécificité montréalaise
Cela dit, le guide n’entre pas dans les détails en matière de modalités d’application des différentes mesures pouvant favoriser aussi bien l’émergence que la consolidation d’une agriculture en milieu urbain, bien qu’il fournisse un large inventaire des meilleures pratiques et de nombreux exemples de cas. En ce sens, Jean-Philippe Vermette pense que les petites municipalités et celles de tailles moyennes vont facilement se retrouver dans ce guide. Selon lui, le document est taillé sur mesure pour elles. C’est un peu moins le cas pour les grandes villes comme Québec. Mais pour Montréal, c’est une tout autre histoire.
« Outre son statut de métropole, précise-t-il, l’un des grands enjeux, à Montréal, c’est la tension d’équilibre entre centralisation et décentralisation, entre la Ville et les arrondissements. Tous ces pouvoirs partagés rendent encore plus complexe l’encadrement d’une pratique qui, comme l’agriculture urbaine, touche à de nombreux domaines tels que l’urbanisme, l’économie, le développement social, le système alimentaire et bien d’autres… En plus de la complexité des champs de compétences, il faut aussi ajouter la spécificité d’un territoire très diversifié. C’est pour ça que je vois d’un bon œil le fait que le bureau de la transition écologique ait intégré le volet de l’agriculture urbaine. »
« Pour le résumer, enchaîne-t-il, le MAMH et le MAPAQ ont fait leurs devoirs. Ils ont produit un document abouti, de qualité et consensuel. Maintenant, en ce qui concerne Montréal, c’est à elle de faire ses devoirs pour se doter d’un guide équivalent qui tienne compte des réalités complexes de son territoire et de l’agglomération. Elle doit accoucher d’une vision claire, dégager de grandes orientations afin d’élaborer un plan cohérent d’agriculture urbaine, comme d’ailleurs s’apprête à le faire la Ville de Québec. »
Voilà donc un guide de bonnes pratiques pour outiller les municipalités du Québec afin qu’elles jouent leur rôle dans l’essor de l’agriculture urbaine. Un guide qui ajoute aussi une pierre à l’édifice de notre autonomie alimentaire.