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Le potentiel est là : en créant des environnements favorables à la mobilité active et à l’achat de proximité, on diminue de facto les émissions de gaz à effet de serre. Avec son initiative Local², le Centre d’écologie urbaine de Montréal (CEUM) se propose justement d’expérimenter et documenter deux projets pilotes d’artères commerciales dans des municipalités de la région montréalaise.
On sait que les cases de stationnement qui flanquent les artères commerciales favorisent l’utilisation de la voiture, au détriment d’autres modes de transport. Notamment la marche. En effet, qui donc souhaiterait faire une promenade dans un lieu qui s’apparente à un terrain de stationnement ? Par contre, si l’on mise sur des aménagements conviviaux, à échelle humaine, on engendre un cercle vertueux qui, au final, contribue à la vitalité économique.
Convivialité = vitalité économique
En effet, pour revitaliser un noyau villageois, mieux vaut installer du mobilier urbain, planter de la végétation, élargir les trottoirs, aménager des placettes ou des pistes cyclables pour attirer aussi bien les flâneurs que les consommateurs. Ce faisant, on dissuade ceux qui seraient tentés d’utiliser l’auto solo pour plutôt encourager la mobilité durable. Donc, non seulement cette convivialité est bonne pour l’environnement, mais elle accroît l’attractivité des lieux, ce qui, en retour, fait tourner les affaires.
Quant à la crainte des commerçants de voir leur chiffre d’affaires baisser avec la diminution des cases de stationnement sur rue, elle demeure infondée. Car c’est tout le contraire qui se produit. Des études, toujours plus nombreuses, tendent à démontrer que plus le potentiel piétonnier d’une rue est élevé, meilleures sont les affaires. L’agence Transport for London a d’ailleurs montré que les rues bien aménagées pour la marche attirent 93 % plus de piétons, ce qui double l’achalandage des boutiques et des cafés. Bref, la marche fait rouler l’économie.
Sur le terrain
Si les études et les exemples de cas abondent, cela ne signifie pas qu’ils soient directement transférables, par exemple d’une grande ville à une plus petite. D’ailleurs, à chaque milieu de vie ses défis, ce qui exige des stratégies et des interventions taillées sur mesure. C’est dans cette optique que le CEUM vient de lancer deux projets pilotes à Sainte-Thérèse et Saint-Constant.
Comme nous l’explique, Mikaël St-Pierre, coordonnateur de projet et de développement au CEUM, dans les grandes villes, les réaménagements des artères commerciales vont bon train. « Elles disposent des ressources nécessaires et les changements de mentalité sont au rendez-vous. Mais c’est une autre histoire dans les plus petites municipalités. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi, de concert avec la Communauté métropolitaine de Montréal, une municipalité dans la couronne nord, Sainte-Thérèse, et une autre dans la couronne sud, Saint-Constant. »
« Dans le cas de Sainte-Thérèse, ajoute-t-il, le réaménagement de la rue Turgeon, entamé vers 2016 et donc bien avant notre projet, est déjà presque complété. Pour Local2 (prononcer Local au carré), c’est donc l’occasion de sonder la population, les commerçants, et les élus afin de mieux comprendre comment ces changements se sont opérés et en mesurer les résultats. Tandis qu’à Saint-Constant, si la volonté de changement est bien présente au sein des élus, tout est encore à faire. Et donc, Local2 se retrouve en position de tester des manières de sensibiliser la population, les commerçants et les institutions afin de les convaincre de la pertinence de transformer l’espace public pour le rendre plus convivial et ensuite de les accompagner dans leur démarche. »
Autres temps, autres contextes
Ces deux municipalités se distinguent aussi par leur typologie, précise Nahoé Tardif, chargée de projets et développement en aménagement et mobilité active. « Sainte-Thérèse possède déjà un noyau villageois à échelle humaine, alors que Saint-Constant est plus représentatif d’un développement de banlieue basé sur la maison unifamiliale, donc fortement dépendant de l’automobile. Deux contextes différents qui vont justement nous permettre d’explorer différentes interventions pour en assurer la transposition dans d’autres municipalités du Québec. »
Cela dit, avec son Exporail, son petit noyau commerçant autour de la gare, ainsi que l’antenne du cégep de Valleyfield et celle de l’UQAM, Saint-Constant possède tout de même un petit pôle commercial et institutionnel. « C’est un petit milieu qui a véritablement le potentiel d’être aménagé de manière plus conviviale afin de stimuler l’achat de proximité et la mobilité durable », insiste Nahoé Tardif.
Avant et après
Deux petites municipalités, donc, qui se distinguent, tant dans l’avancement des étapes de réaménagement de leur artère commerciale que dans leur modèle de développement. Local2 va pouvoir en retirer des apprentissages certes différents, mais complémentaires, précise Mikaël St-Pierre. Sainte-Thérèse, sert notamment à documenter l’« après » et Saint-Constant l’« avant » de la transformation d’une rue commerciale en rue conviviale.
« Avec ces deux municipalités, enchaîne Nahoé Tardif, nous pouvons réaliser les trois volets de notre projet : accompagner le processus de transformation de l’artère commerciale ; sensibiliser la population et les commerçants pour qu’ils changent leurs habitudes de vie ; et, à terme, réaliser une évaluation environnementale du cercle vertueux de la convivialité dans une perspective de transition écologique. »
Après des décennies de développement urbain axé sur l’automobile, on commence à dénoter un changement de paradigme, se réjouit Mikaël St-Pierre. « De plus en plus, on valorise les milieux de vie à échelle humaine, on repense les espaces publics, on réfléchit aux options de mobilité pour s’affranchir du seul modèle de l’auto solo. Bien sûr, de tels changements impliquent de nombreux acteurs et demandent beaucoup de temps, mais c’est notre objectif, avec Local2, de favoriser le passage à l’action ! »
Pour en savoir plus, consultez la fiche Des rues commerciales conviviales pour accélérer la transition écologique.