Éducation alimentaire

Littératie alimentaire: 4 compétences essentielles à développer chez les élèves du primaire

Littératie alimentaire: 4 compétences essentielles à développer chez les élèves du primaire

Ressource

Êtes-vous de celles et ceux qui rêvent que l’éducation alimentaire fasse un jour partie intégrante du programme scolaire ? Saviez-vous que plusieurs initiatives à vocation pédagogique existent déjà en milieu scolaire primaire, dont un projet d’ateliers culinaires qui roule depuis plus de 20 ans ? Conçus par des expert·es en enseignement et en nutrition et arrimés au Programme de formation de l’école québécoise et à l’approche École en santé, ces ateliers ciblent quatre compétences pour améliorer la littératie alimentaire des élèves de 5 à 12 ans.

Pour se mettre en appétit, remontons quelques décennies en arrière. En 1989, dans une école primaire de Montréal, un groupe de parents participant à un projet de cuisine collective lance l’idée de préparer des repas pour les enfants. Quelques années plus tard, en 1995, un volet éducatif s’ajoute à cette initiative, avec l’entrée en scène d’une nutritionniste pour animer des activités auprès des élèves. S’ensuit la création de l’OBNL Ateliers cinq épices et du projet Petits cuistots-Parents en réseaux (PC-PR). Depuis 2003, les ateliers de cuisine-nutrition vivent grâce aux nutritionnistes des Ateliers cinq épices et aux milliers d’animatrices formées par l’organisme aux quatre coins du Québec.

 

Des activités culinaires pour développer les compétences des enfants

Si le cœur de ces ateliers culinaires est de faire cuisiner les élèves, toute la réflexion derrière se résume par l’acronyme PACAN, pour Programme de formation à l’art culinaire, à l’alimentation et à la nutrition, un document de 53 pages, élaboré au milieu des années 2000 par les nutritionnistes des Ateliers cinq épices, en collaboration avec une équipe multidisciplinaire de recherche des universités de Sherbrooke et de Montréal. « Le PACAN vise l’acquisition de connaissances en alimentation et en nutrition, ainsi que de savoir-faire en cuisine; de plus, il vise le développement d’attitudes et de comportements permettant l’acquisition de saines habitudes alimentaires afin de favoriser la santé et le bien-être de l’enfant et de sa famille1. »

Comme le Programme de formation de l’école québécoise, le PACAN est orienté vers le développement de compétences, en privilégiant une perspective constructiviste de l’apprentissage, où l’élève occupe un rôle actif. Les deux programmes ont pour mission les mêmes axes de développement : instruire, socialiser et qualifier. Même si beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis sa création, le PACAN est toujours d’actualité en 2025 et s’inscrit parfaitement dans les objectifs du référent ÉKIP, ayant comme point de mire la santé et le bien-être des jeunes.

Voici un survol des quatre compétences de la discipline Art culinaire, alimentation et nutrition, comprise dans le PACAN.

compétences en littératie alimentaire
Crédit photo: Les Ateliers cinq épices

1 - Développer une culture alimentaire

La culture alimentaire touche plusieurs domaines d’apprentissage, tels que la science et la technologie, les langues (lecture et écriture) et l’univers social (histoire et géographie). Des compétences transversales sont également mises à contribution, notamment d’ordre intellectuel, alors qu’on amène l’élève à interpréter de l’information et à exercer son jugement critique. 

C’est avant et pendant les ateliers culinaires que ces concepts théoriques prennent forme. Les occasions de les aborder sont multiples, que ce soit par la réalisation d’une activité préparatoire, la présentation de notions vulgarisées, un jeu pédagogique ou la découverte des ingrédients d’une recette. De plus, chaque atelier est construit autour d’une thématique et le programme complet couvre une variété de sujets liés au monde de l’alimentation, afin d’enrichir le bagage des jeunes.

Voici quelques exemples qui montrent comment les élèves sont concrètement amenés à élargir leur culture alimentaire : 

  • Se familiariser avec l’origine de plusieurs aliments : le yogourt est fabriqué à l’aide de bactéries ; la majorité des œufs retrouvés à l’épicerie sont pondus par des poules ; la farine est faite à partir de grains qui poussent dans un champ, etc.
  • Jouer à replacer en ordre les étapes illustrées de la fabrication du pain, ou s’initier au phénomène de la fermentation !
  • Compléter un texte troué sur les melons, ou faire un charivari avec les noms de différentes variétés de légumineuses.
  • Distinguer les étapes de la croissance d’une courge, de la graine au fruit, à l’aide d’images et de textes.
  • Découvrir que le poisson est très important dans un pays au bord de l’océan, comme le Sénégal, ou que le riz est à la base de l’alimentation dans plusieurs pays d’Asie, comme la Thaïlande.
  • Apprendre que l’être humain est constitué en grande partie d’eau, et qu’à l’intérieur de notre ventre se cachent de longs tuyaux qu’on appelle les intestins.
oeufs
Crédit photo: Les Ateliers cinq épices

2 - Réaliser des recettes nutritives

Cette deuxième compétence du PACAN est assurément la vedette du projet ! Elle se concrétise avec la préparation, par les élèves, d’une recette à base d’aliments du quotidien, conçue par les nutritionnistes des Ateliers cinq épices et rédigée en plusieurs versions, adaptées à chaque cycle scolaire.

Lors de la réalisation d’une recette, deux domaines d’apprentissage sont particulièrement sollicités : la mathématique et le français. Un soupçon d’arts plastiques peut également s’y insérer ! Du côté des compétences transversales, l’utilisation de méthodes de travail efficaces est essentielle en cuisine.

Comment intégrer ces apprentissages en popotant, tout en forgeant son sens de l’organisation ? De petits gestes, en apparence banals, l’illustrent à merveille :

  • Lire attentivement une recette.
  • Suivre les étapes, une à la fois, et non tout faire en même temps !
  • Répartir les tâches entre les membres d’une équipe, et encourager le partage chez les plus jeunes.
  • Prendre conscience que, pour mesurer la poudre à pâte à l’étape 2, il faut se référer au mystérieux tableau au début de la recette qui contient plein de mots, de chiffres et de lettres.
  • Explorer les formes géométriques en coupant des cubes de pomme de terre ou des triangles de fromage.
  • Se démêler parmi les unités de mesure (millilitres, tasses, cuillères à soupe et à thé, etc.).
  • Toucher, sentir, manipuler, mesurer, couper, hacher, presser, fouetter, touiller… et enrichir son vocabulaire !
  • Comprendre d’une manière concrète les fractions en coupant une demi-carotte, ou en mesurant un quart de tasse de lait.
  • Créer une présentation originale avec des légumes sur une pizza, ou trouver un agencement harmonieux en garnissant un bol smoothie de morceaux de fruits colorés.
  • Une fois le travail terminé, échanger avec les autres sur l’expérience : les étapes les plus faciles ou difficiles, l’envie ou la crainte de goûter à la recette, etc.
atelier culinaire dans une école
Crédit photo: Les Ateliers cinq épices

3 - Apprécier des aliments et des mets nutritifs

La communication orale est à l’honneur avec cette compétence, qui fait écho à la compétence disciplinaire du même nom et à celle, transversale, de s’exprimer de façon appropriée. À la fin de l’atelier, lorsque vient le temps de goûter à la recette préparée, ou lors de la dégustation dirigée d’un aliment en lien avec la thématique, les langues se délient, ce qui donne place à un festival de tournures savoureuses ! « C’est tellement bon que je vais m’évanouir ! », « Je donne un 12 sur 10 ! » ou « Ça goûte trop le clou de girafe ».

L’atelier culinaire donne aux élèves l’occasion de s’exercer à trouver les bons mots pour se faire comprendre. En voici des exemples :

  • Se souhaiter « Bon appétit ! », en chantant ou non !
  • Verbaliser les sensations perçues par ses cinq sens.
  • Faire part de son appréciation à ses camarades.
  • Trouver une variété de termes pour décrire les saveurs et les textures.
  • Si la recette est moins appréciée, réfléchir à des pistes pour l’améliorer ou l’adapter à son goût. Plus de cannelle ? Moins de persil ? Des fraises plutôt que des bleuets ? Toutes les suggestions sont accueillies avec ouverture.
  • Exprimer de façon respectueuse une opinion moins favorable : « Ce n’est pas à mon goût… », « Ah, c’est surprenant ! » ou « Ma bouche changera peut-être d’idée un jour ! »
recette atelier culinaire
Crédit photo: Les Ateliers cinq épices

4 - Prendre conscience de l’activité humaine en alimentation, dans une perspective de développement durable

Ce sujet complexe donne lieu à de riches discussions et touche à des domaines généraux de formation, tels que l’environnement, la consommation et le vivre-ensemble. En sensibilisant les élèves aux bienfaits d’une attitude responsable en alimentation, d’autres domaines et disciplines, dont l’univers social et la science et technologie, sont effleurés, tout comme les compétences transversales d’ordre personnel et social.

Un mode alimentaire plus durable, éthique et respectueux de l’environnement est abordé lors de certains ateliers thématiques, comme ceux sur les produits locaux, sur l’agriculture biologique ou sur le commerce équitable.

Il faut user d’imagination pour réussir à vulgariser ces notions abstraites auprès d’un public aussi jeune ! Les ateliers ludiques de cuisine représentent une occasion en or d’en démystifier quelques aspects :

  • Comprendre que certains aliments sont cultivés tout près de chez soi, comme la carotte ou la pomme, alors que d’autres, comme la banane ou le kiwi, parcourent des milliers de kilomètres avant d’aboutir dans la boîte à lunch.
  • À l’aide de deux paysages agricoles illustrés, nommer ce qui distingue la production biologique de celle plus conventionnelle : machinerie, taille des fermes, utilisation ou non de produits chimiques, etc.
  • Apprendre à repérer le « p’tit bonhomme » du logo de la certification équitable.
  • S’amuser à « trouver les différences » entre la culture commune des bananes et celle des bananes équitables.
  • Opter pour des pépites de chocolat équitable lors de la préparation de boules d’énergie et prendre conscience que ce geste a pu contribuer à améliorer la qualité de vie des gens qui cultivent les fèves de cacao.
recette équitable
Crédit photo: Les Ateliers cinq épices

Les avantages des ateliers culinaires conçus selon une approche éducative structurée

Cuisiner avec les enfants, c’est tout simple et naturel. Cela dit, adopter une approche issue d’une réflexion approfondie et reposant sur de solides assises pédagogiques comporte une valeur ajoutée. Ce choix peut :

  • Contribuer à convaincre les directions et les instances concernées de la pertinence des activités culinaires en milieu éducatif.
  • Être utile pour le personnel enseignant, en proposant des situations d’apprentissage authentiques.
  • Faciliter l’intégration des ateliers culinaires au projet éducatif d’une école.
  • Enfin (et surtout), faire en sorte que les élèves retirent le plus d’apprentissages possible de leur expérience de cuisine à l’école.
     

Pour en savoir plus

Les Ateliers cinq épices ont pour mission de favoriser l’éducation nutritionnelle et culinaire auprès des enfants et de leur famille, par le biais d’ateliers de cuisine, principalement en milieu défavorisé. Pour en savoir plus, visitez leur site Web.

Découvrez également les faits saillants de l’évaluation du projet PC-PR menée par une équipe de recherche multidisciplinaire. 

1 Programme de formation à l’art culinaire, à l’alimentation et à la nutrition, Les Ateliers cinq épices, p. 5. Le document n’est pas disponible en ligne.

Communauté

Vous avez aimé l’article?

En quelques clics, joignez notre communauté et obtenez le meilleur de 100º grâce à des ressources personnalisées.

Créer mon profil
DEVENEZ AMBASSADEUR ET FAITES BRILLER LES PROJETS DE DEMAIN