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Face à la détérioration des écosystèmes, des individus et des organisations visionnaires refusent la fatalité et mettent sur pied d'étonnantes initiatives pour soutenir la résilience écologique. Tour d'horizon de 4 projets, sur 2 continents.
À l’instar du développement de jeunes plants sur un sol incendié, la nature a la capacité de se reconstruire après une grave perturbation, telle une inondation ou une pollution industrielle. Mais lorsqu’un lieu ou un habitat peine à renaître, un coup de pouce humain peut faire la différence pour renforcer cette résilience écologique, comme en témoignent les exemples suivants.
Renaissance d’une forêt tropicale
Au Brésil, une jeune forêt s’épanouit sur près de 700 hectares à quelque 500 km au nord-est de Rio de Janeiro. Avec plus de 2 500 000 arbres de 290 espèces, cette zone forestière est actuellement l’habitat d’au moins 172 espèces d’oiseaux, 33 espèces de mammifères et une trentaine d’espèces d’amphibiens et de reptiles.
Rien pourtant ne laissait deviner un tel écosystème une vingtaine d’années plus tôt. Car à cette époque, les arbres occupaient à peine 0,5 % du domaine de cette ancienne ferme dont venait d’hériter le célèbre photographe Sebastião Salgado. La luxuriante forêt de son enfance avait ainsi fait place à une vaste étendue de terre aride sous l’effet de la déforestation et de l’élevage de bétail.
Avec sa femme, le photographe se lance alors dans un incroyable projet de reboisement pour rendre l’état originel de cette forêt. Ils créent l’Institut Terra pour mener cette mission sur le domaine familial, mais aussi ailleurs dans le pays. En quelques années, le couple réussit avec l’aide d’employés, de bénévoles et de partenaires à faire renaître cette forêt où l’écosystème s’est naturellement reconstitué. Des sources d’eau ont réapparu, attirant même des animaux en voie de disparition au Brésil comme l’ocelot ou le singe titi atlantique. Un changement qui selon Sebastião Salgado – dans le documentaire Le sel de la terre de Wim Wenders - démontre que « la destruction de la nature n’est pas irréversible. »
Un dépotoir devenu parc urbain
On décrit souvent le parc Frédéric-Back dans le quartier Saint-Michel à Montréal comme l’un des plus ambitieux projets de réhabilitation environnementale en milieu urbain en Amérique du Nord. Et pour cause : les travaux et les aménagements menés depuis plusieurs années sur ses 153 hectares visent à métamorphoser ce lieu situé sur une ancienne carrière, elle-même transformée en site d’enfouissement où sont ensevelies plus de 40 millions de tonnes de matières résiduelles jusqu’en 2009.
Le projet de réhabilitation fait preuve d’innovation pour s’adapter à l’histoire du site et aux conditions du terrain. En installant par exemple 250 sphères à l’allure futuriste pour capter le biogaz qui se dégage des déchets enfouis. Grâce à un réseau souterrain, ce gaz est ensuite acheminé à la centrale du Complexe environnemental de Saint-Michel pour produire de l’électricité. Colline boisée, plaine herbacée, lac au pied de la falaise de l’ancienne carrière et autres bassins de rétention végétalisés, l’aménagement veut notamment mettre en valeur le développement de l’écosystème faunique. D’ailleurs, sur la trentaine d’hectares du parc déjà ouverte au public, la plantation de milliers d’arbres, d’arbustes et de vivaces indigènes a rapidement attiré une faune locale comprenant petits mammifères, amphibiens et insectes pollinisateurs.
Des bisons au secours de la biodiversité
La présence de bisons d’Europe sur les dunes côtières du parc naturel Kraansvlak aux Pays-Bas a tout pour surprendre. Mais si les bisons sauvages ont bel et bien disparu depuis 1927 sous l’effet du déboisement et de la chasse, les projets de recherche se multiplient depuis plusieurs années pour réintroduire à l’état sauvage ce plus grand mammifère d’Europe. L’objectif est notamment de favoriser la résilience écologique grâce au réensauvagement, un concept selon lequel il est possible de restaurer les écosystèmes en laissant faire la nature, et en l’aidant notamment par la réintroduction d’animaux sauvages.
L’introduction de bisons dans le parc Kraansvlak en 2007 vise précisément à lutter contre les graminées et les arbustes envahissants, nocifs pour l’ensemble de la biodiversité locale. Grands mangeurs d’herbe, mais aussi d’écorces d’arbres et d’arbustes, une vingtaine de bisons contribuent depuis au maintien de l’équilibre écologique dans ce parc de 330 hectares. Le succès des résultats a amené les Pays-Bas à reproduire ailleurs ce projet, qui parallèlement soutient la préservation des bisons d’Europe, une espèce menacée jusqu’en 2020.
Le renouveau par le verdissement
Symbole de la puissance de l’industrie automobile jusque dans les années 60, la ville américaine de Détroit subit un inexorable déclin industriel avant de déclarer faillite en 2013. Une période difficile où un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, des enfants souffrent de malnutrition et les déserts alimentaires se multiplient alors que 78 000 bâtiments sont abandonnés.
La population et les organisations communautaires se mobilisent alors pour revitaliser leurs quartiers. Car pour eux, les friches urbaines et industrielles qui s’imposent dans les quartiers les moins nantis et où réapparaît une végétation spontanée sont autant d’opportunités pour reboiser, développer des corridors verts et réhabiliter l’agriculture urbaine.
Des milliers de potagers familiaux et de fermes urbaines voient ainsi le jour. Ils offrent un accès à des aliments frais aux plus démunis, favorisent la création de liens entre les citadins et augmentent leur qualité de vie. À l’instar de l’Initiative d’agriculture urbaine du Michigan, un potager communautaire d’un hectare qui produit près de 300 variétés de fruits et légumes distribués gratuitement aux résidents du voisinage. Aujourd’hui reconnue pour son agriculture urbaine, Détroit est membre du Fab City, un réseau mondial de villes et régions qui explorent les moyens d’être autosuffisantes d’ici 2054.
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