Les stratégies préventives environnementales sont les plus efficaces pour prévenir les blessures à la tête des usagers de la route, conclut la Direction régionale de santé publique (DSP) de Montréal dans un rapport récemment publié.
Après avoir analysé l’ampleur et la distribution des blessures à la tête survenues à la suite de collisions routières, la DSP de Montréal recommande non seulement de diminuer la vitesse des véhicules motorisés, mais aussi de mettre en place des politiques publiques qui visent une réduction de la place accordée à l’automobile. De plus, la DSP suggère d’investir davantage en faveur des transports actifs et collectifs pour à la fois améliorer le bilan routier et réduire les problèmes de santé publique associés aux transports.
L’approche populationnelle
En vue de réduire le nombre total d’usagers de la route blessés en milieu urbain, la DSP s’est inspirée d’une approche populationnelle. Selon cette approche, il faut d’abord identifier les déterminants - les causes sous-jacentes - à la source d’un problème de santé publique. Et, comme le formule la DSP : « Fondamentalement, les dommages et traumatismes routiers sont causés par le transfert d’énergie du véhicule en mouvement aux objets et aux personnes ». En conséquence, réduire la vitesse des véhicules équivaut à diminuer le « transfert d’énergie » lors d’une collision. Par ailleurs, diminuer le volume de circulation automobile permet de réduire les risques de collisions.
« Les stratégies environnementales sont généralement plus efficaces que les stratégies préventives nécessitant une action individuelle, volontaire. »
L’aménagement du territoire et la conception de la chaussée ont donc une grande influence sur la fréquence et la gravité des traumatismes routiers. Par exemple, selon les données hospitalières montréalaises, la majorité des piétons (62 %), des cyclistes (66 %), des motocyclistes (53 %) et des occupants de véhicules (70 %) ayant subi un traumatisme craniocérébral (TCC) ont été blessés sur une artère, là où le volume et la vitesse des véhicules sont plus élevés.
« La réduction de la vitesse des véhicules par des aménagements appropriés réduit le nombre de décès et de blessures graves pour tous les usagers de la route, incluant les piétons et les cyclistes. »
Blessures à la tête associées aux types de déplacement
À Montréal, les cyclistes et les piétons, qui habitent dans le centre-ville et les quartiers centraux, représentent la majorité des hospitalisations d’usagers de la route ayant subi un TCC. Par contre, dans les banlieues et les couronnes, ce sont les automobilistes qui représentent la majorité des hospitalisations d’usagers de la route ayant subi un TCC. Il existe donc une étroite corrélation entre le mode de transport utilisé et le taux per capita d’hospitalisations d’usagers de la route. Pour le résumer, que l’on soit automobiliste, cycliste ou piéton, plus nos déplacements nous exposent à la présence de voitures et de camions, plus les risques sont grands de subir un TCC. D’où la grande pertinence d’investir dans les transports collectifs afin de diminuer le volume des véhicules automobiles.
« Les déplacements effectués en transport collectif sont beaucoup plus sécuritaires qu’en automobile, tant pour les occupants de véhicules que pour les autres usagers, piétons et cyclistes. »
Port du casque à vélo
Il est bien sûr recommandé de porter un casque à vélo. Toutefois, une législation sur le port obligatoire du casque à vélo (LPOCV) n’aurait pas vraiment d’impact sur le nombre de TCC. La DSP cite, à ce chapitre, 2 études canadiennes montrant que les taux de blessures à la tête ne diffèrent pas de manière significative entre les provinces qui ont imposé une LPOCV et celles qui, comme le Québec, n’en ont pas. Ce même constat ressort d’une revue de la littérature à l’échelle internationale.
Il est toutefois intéressant de souligner que dans les pays industrialisés où l’usage du vélo est le plus fréquent, comme les Pays-Bas, le Danemark et l'Allemagne, le port du casque est peu fréquent et il n’est pas obligatoire. Ces pays ont plutôt opté pour des stratégies environnementales comme, bien sûr, l’implantation de vastes réseaux de pistes cyclables. À titre d’exemple, aux Pays-Bas, le risque de décès par kilomètre parcouru est 5 fois plus faible qu’aux États-Unis, alors que seulement environ 1 % des adultes et 3 à 5 % des enfants portent le casque à vélo.
Dans un mémoire présenté à la consultation publique de la SAAQ en février 2017, le Directeur de la santé publique de Montréal a notamment écrit : « Une réallocation de l’espace et des ressources financières dédiés actuellement à l’automobile en faveur des transports actifs et collectif serait bénéfique non seulement pour l’amélioration de la sécurité routière, mais aussi pour d’autres problèmes de santé publique associés à la pollution de l’air, à l’inactivité physique, aux gaz à effet de serre (GES), etc. »
Portrait de la situation en quelques chiffres
Aux intersections où le volume de véhicules est très élevé, il y a 31 fois plus d’usagers de la route avec un TCC et 30 fois plus d’usagers de la route blessés à la tête qu’aux intersections avec très peu de véhicules.
De 2006 à 2010, parmi les 2 965 décès d’usagers de la route au Québec, 1 253 avaient un traumatisme craniocérébral (TCC) et la majorité d’entre eux étaient des usagers de véhicules à moteur, occupants de véhicules (67 %) ou motocyclistes (10 %). Les piétons (16 % et les cyclistes (5 %) représentaient environ un cinquième des décès d’usagers de la route avec un TCC.
De 2006 à 2010, parmi les 23 018 hospitalisations d’usagers québécois de la route, 6 131 avaient un diagnostic de TCC. Dans la majorité des cas, il s’agissait d’usagers de véhicules à moteur, occupants de véhicules (52 %) ou motocyclistes (9 %). Les cyclistes (18 %) et les piétons (14 %) représentaient environ le tiers des hospitalisations d’usagers de la route avec un TCC.