Pas facile d’avoir accès à des aliments frais quand on habite sur un grand territoire où les commerces d’alimentation sont peu nombreux. Dans la MRC du Témiscouata, qui compte 19 municipalités, des partenaires locaux et régionaux ont choisi d’accompagner la MRC dans cet enjeu en misant sur trois volets successifs : les jardins communautaires, le rang partagé et des frigos libre-service.
Baptisée Jardins collectifs : Un jardin pour demain, et portée par la Maison des jeunes, cette initiative a débuté en 2017. Elle est financée par la Direction de santé publique (DSPu) du CISSS du Bas-Saint-Laurent dans le cadre du Programme de soutien financier pour une Saine alimentation pour tous. À ce budget, s’ajoute un soutien financier de la table intersectorielle en saines habitudes de vie COSMOSS*, de la MRC et de la Commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs.
Une mise en œuvre concertée
Un comité composé de représentants des maisons des jeunes et des maisons de la famille, du CISSS du Bas-Saint-Laurent, de COSMOSS et de la MRC s’est mis en place. « Les partenaires qui font partie de ce comité connaissent bien le milieu, une condition gagnante pour mobiliser les municipalités et les encourager à pérenniser leurs actions », explique Carole Deschênes, organisatrice communautaire à la DSPu.
Embauchée par le comité, la chargée de projet Marie-Danielle Duval a parcouru la MRC pour présenter l'initiative dans les nombreuses municipalités. « Elles se sont montrées sensibles au fait que ce projet pouvait avoir une foule d’effets positifs sur la qualité de vie des citoyens : accès à des aliments sains, socialisation, fierté et sentiment d’appartenance à la communauté », explique-t-elle.
Un soutien personnalisé et des municipalités engagées
Des rencontres avec des comités locaux, des comités de personnes de 50 ans et plus, ainsi qu’avec des directeurs généraux de municipalités, ont ensuite permis de bien répondre aux besoins de chaque milieu. « Par exemple, à Saint-Louis-du-Ha! Ha!, un jardin communautaire existait déjà, mais il n’y avait pas d’accès à l’eau courante, décrit Marie-Danielle Duval. C’est maintenant la municipalité qui remplit les barils d’eau fournis par le projet Un Jardin pour demain. »
À Packington, où il n’y avait pas de jardin, ce sont des employés de la municipalité qui ont construit les bacs de jardinage surélevés, avec du bois payé par le projet. D’autres municipalités ont également fourni main-d’œuvre, machinerie et camions pour le transport des matériaux et l’aménagement des jardins. « De telles contributions favorisent la pérennisation des initiatives locales », souligne Carole Deschênes.
La municipalité de Saint-Marc-du-Lac-Long a, pour sa part, arrimé la création de son jardin communautaire avec sa politique familiale qui était en cours d’élaboration. « La démarche Municipalité amie des aînés est également un bon prétexte pour créer ou bonifier un jardin communautaire, car c’est un lieu de socialisation extraordinaire, mais aussi un lieu où les aînés se sentent valorisés lorsqu’ils transmettent leurs connaissances horticoles », note Marie-Danielle Duval.
Une formation pour pérenniser les jardins
Pour que les initiatives de jardin communautaires jardin durent dans le temps, une formation en vie démocratique et horticulture a été offerte aux citoyens, grâce à la collaboration de l’entreprise locale Coup d’pousses et la Commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs. « En janvier 2018, trois groupes ont reçu cette formation de 18 heures dans trois secteurs de la MRC, souligne Marie-Danielle Duval. En 2019, elle a été suivie par les participants au projet d’insertion socioprofessionnelle Livr’Avenir, de Service Accès-emploi. »
Encourager la solidarité
En 2018 a surgi l’idée du « rang partagé » et des frigos libre-service. Inspiré des Fruits partagés de Moisson Rimouski Neigette, le principe est le suivant : les jardiniers qui participent à l’initiative partagent une partie de leur récolte en la déposant dans ces frigos, qui sont accessibles à tous 24 heures sur 24.
En 2019, 8 frigos en libre-service étaient installés dans différentes municipalités. « De juillet à octobre, ils se remplissent et se vident régulièrement et il y a aussi des échanges entre les jardiniers : certains déposent leur surplus de betteraves et prennent des tomates », souligne Marie-Danielle Duval.
Des brouettes de bonnes idées
Actuellement, 16 municipalités ont embarqué dans au moins un des volets du projet, qui a entraîné une cascade d’effets positifs et d’initiatives dans la MRC, dont :
- La transmission de valeurs de partage, de connaissances horticoles aux jeunes qui fréquentent 10 camps de jour de la MRC.
- La mise sur pied d’activités estivales d’horticulture pour les ados.
- Des activités intergénérationnelles de jardinage et de préparation de collations, créant des liens entre les écoles, les résidences pour personnes âgées et les Cercles des Fermières.
- Une conférence sur la culture en serre qui a attiré 50 personnes.
- La Ville de Témiscouata-sur-le-Lac a entamé des démarches pour devenir une municipalité nourricière.
- La mise en place de bacs de jardinage en libre-service, sur le principe des Incroyables comestibles.
Reconnaissance, implication et fierté
« Les citoyens de tous les âges manifestent leur intérêt et leur reconnaissance, se réjouit Marie-Danielle Duval. Que ce soit des jeunes qui font découvrir les frigos libre-service à leurs parents, une dame âgée qui vient chercher une salade chaque jour ou un papa de fin de semaine qui nous remercie de lui donner les moyens d’offrir des fruits et légumes frais à ses enfants. »
« La fierté des municipalités est palpable, ajoute Carole Deschênes. Il y a même une émulation entre elles et leurs services des loisirs sont maintenant impliqués dans le projet. » Avec la presque totalité des municipalités engagées d’une façon ou d’une autre, Jardins collectifs : Un jardin pour demain se révèle un succès dans la MRC de Témiscouata !
* COSMOSS : Communauté ouverte et solidaire pour un monde outillé, scolarisé et en santé