Alimentation institutionnelle

Cantines éphémères : 700 élèves traités aux petits oignons

Cantines éphémères : 700 élèves traités aux petits oignons

Carrés aux camerises, poulet yassa, chili végétarien au thym sauvage, pizza au fromage de chèvre : le menu dégustation d'aliments locaux servi dans deux écoles secondaires de Bellechasse a fait un tabac l’automne dernier ! Histoire d’un événement bien spécial, concocté par un traiteur dynamique et financé par la Table régionale de concertation sur les saines habitudes de vie en Chaudière-Appalaches.

Le service traiteur Les jardins d’Edgar sert des repas dans quatre écoles de la région de Bellechasse depuis 2012. Sa propriétaire Andrée Nolet a toujours fait une grande place aux produits locaux, frais et nutritifs. « Valoriser les aliments locaux est une mission pour moi, affirme-t-elle. Alors, obtenir du financement pour organiser un événement spécial qui ferait découvrir aux jeunes ce qui est produit dans le coin, ça m’a vraiment motivée ! »

Savourer des aliments locaux à l’école

Ce financement, Andrée Nolet l’a obtenu dans le cadre du projet « Ensemble pour savourer les aliments à l’école », soutenu par la Table régionale de concertation sur les saines habitudes de vie en Chaudière-Appalaches (TSHV). « Ce projet, amorcé à l’automne 2018*, vise l’amélioration de l’offre alimentaire dans les écoles secondaires et primaires, en misant sur des aliments de haute valeur nutritive préparés avec des produits locaux, et attrayants pour les élèves », explique Geneviève Rainville, coordonnatrice de la TSHV.

« Le soutien au traiteur comprend l’accompagnement personnalisé d’un formateur, ainsi que la mise en place d’une collaboration durable avec l’équipe-école, ajoute Marie-Eve Morin, agente de promotion des saines habitudes de vie à la Direction de santé publique  du CISSS de Chaudière-Appalaches. Ce soutien inclut également une allocation financière pour organiser des dégustations gratuites dans les écoles de la région. »

Octobre : des aliments hyperlocaux à Saint-Anselme

À Saint-Anselme, Andrée Nolet a réalisé un tour de force au chapitre des aliments de proximité. « Tous les ingrédients de base, comme des camerises, le poulet, les légumes et le fromage de chèvre, venaient de producteurs situés sur le territoire du village », souligne-t-elle. L’autre tour de force, c’est d’avoir préparé un dîner comptant sept plats différents, même si l’idée de départ était moins ambitieuse.

« Je sais que les jeunes sont curieux, et c’était l’occasion rêvée de stimuler leurs papilles, alors j’en ai profité, confie Andrée Nolet. Et les producteurs étaient tellement contents de participer à cet événement qu’ils voulaient donner leurs produits, plutôt que de les vendre. » Mais Andrée Nolet a payé ses fournisseurs rubis sur l’ongle, grâce au financement de 4000 $ octroyé par la TSHV. « Les achats d’aliments comptent pour la moitié de cette somme, précise Geneviève Rainville. Le reste a servi à payer les heures de travail des employés, ce qui comprenait de la formation pour les cuisiniers, du temps d’élaboration de menus à valeur nutritive bonifiée et l’événement de la cantine éphémère. »

L’équipe-école, très impliquée dans la mise en place de l’événement, en a constaté les bénéfices. « Pendant la dégustation, j’ai vu plusieurs élèves prendre plaisir à discuter de leurs préférences personnelles, souligne Frédéric Vallières, enseignant en mathématiques en secondaire 1 à l’école de Saint-Anselme. Et lorsque j’en ai reparlé avec eux en classe, ils m’ont dit avoir aimé découvrir des mets qu’ils n’avaient jamais goûtés avant et savoir que les ingrédients venaient du coin. »

Décembre : saveurs boréales à Saint-Damien

Andrée Nolet a voulu offrir un menu différent aux élèves de Saint-Damien. « Je ne voulais pas faire de copié/collé, souligne-t-elle. J’ai choisi de mettre l’accent sur les saveurs boréales, car l’environnement de Saint-Damien est plus forestier. » Les élèves ont donc eu droit à de la limonade au thé du Labrador, à un chili végétarien au thym sauvage et du poulet à l’érable et au romarin. Le seul point commun entre les deux dégustations a été le carré aux camerises.

« Près de 90 % des élèves sont venus et j’ai vu beaucoup de sourires, raconte Patrick Gagnon, directeur de l’école secondaire de Saint-Damien. J’ai trouvé l’expérience très positive, car les élèves ont pu goûter à des plats très diversifiés, dans un contexte où ils pouvaient donner leur avis. » C’est le poulet à l’érable et au romarin qui a remporté la palme auprès des élèves. Le vote était l’un des moyens utilisés pour mobiliser et consulter les jeunes, et pour les impliquer dans l’amélioration de l’offre alimentaire.

Arrimage éducatif

La Cantine éphémère s'est aussi avérée une belle occasion d’utiliser la thématique des aliments avec les élèves. « À Saint-Anselme, la professeure d’arts plastiques a travaillé sur la présentation de la salade de betteraves, relate Marie-Eve Morin. Le résultat était très attrayant ! »

À Saint-Damien, l’école secondaire compte une annexe qui accueille des élèves de 6année. Ceux-ci ont été invités et en ont été très reconnaissants. « Leur enseignante en a fait un exercice de français et j’ai reçu un texte de chacun des élèves, raconte Andrée Nolet. Ils y parlaient de ce qu’ils avaient aimé et moins aimé, leurs commentaires étaient très pointus ! La découverte de nouveaux plats leur a plu et ils étaient fiers de savoir qu’ils contenaient des produits locaux. » Par ailleurs, une quarantaine d’élèves ont contribué au service.

Compost et zéro déchet

À l’école de Saint-Anselme, l’enseignant de mathématiques Frédéric Vallières a profité de l’événement pour lancer le projet de compostage. « Grâce à un financement de la MRC, de la commission scolaire et de l’école, nous avons acheté un composteur et je trouvais que c’était un bon moment pour le présenter aux élèves, explique-t-il. Certains m’ont dit que leurs parents faisaient eux aussi du compost et qu’ils étaient contents que la cafétéria s’y mette. D’autres étaient agréablement surpris d’apprendre que les assiettes en carton et les ustensiles en bambou utilisés pour la dégustation étaient compostables. »

À Saint-Damien, le compostage des résidus alimentaires se fait actuellement de façon informelle, mais l’idée d’un composteur fait son chemin. « Plutôt que d’en acheter un, nous pensons plutôt le faire fabriquer par les élèves qui participent à l’atelier du travail du bois », indique le directeur Patrick Gagnon.

« Ce volet zéro déchet est le résultat direct de la concertation avec les écoles, signale Marie-Eve Morin. Être à l’écoute des besoins et des intérêts des jeunes a porté fruit, car les lettres des élèves de 6année contenaient des commentaires positifs sur le compostage et les recettes végétariennes. »

De la Cantine éphémère au bar à salades

Les deux écoles veulent aller plus loin en faisant une demande de bourse auprès du réseau De la ferme à la cafétéria Canada, qui finance l’implantation de bar à salades dans les cantines scolaires. « C’est exactement le but recherché, souligne Geneviève Rainville. Nous donnons un coup de pouce financier ponctuel en espérant générer des changements durables dans les menus offerts aux élèves. »

Bourse ou pas, les élèves auront l’occasion de faire l’expérience d’un bar à salade éphémère en septembre 2020. « Habituellement, j’organise une épluchette de blé d’Inde, mais cette année, ce sera un bar à salades géant, et je sais que je peux le faire à peu de frais, se réjouit Andrée Nolet. Lorsque les producteurs, dont les maraîchers, m’ont proposé leurs produits gratuitement, je leur ai dit que je les solliciterai plutôt en septembre prochain. »

En attendant, elle prépare un autre menu dégustation qui sera servi fin février à l’école primaire de Saint-Charles. Elle offrira également les plats coups de cœur des élèves de façon régulière. Les carrés aux camerises, qui contiennent des graines de chanvre et de lin, ont eu tellement de succès qu’Andrée Nolet les met désormais chaque jour au menu.

« Nous avons maintenant deux écoles championnes, bientôt trois, qui pourraient en influencer d’autres dans la région, se réjouit Marie-Eve Morin. Le succès d’Andrée Nolet peut inspirer d’autres traiteurs à faire progressivement des pas dans le même sens, d’autant plus que la fréquentation des deux cafétérias a augmenté. Nous espérons également que les commissions scolaires et les écoles travaillent de concert avec les traiteurs pour poursuivre l’amélioration de l’offre alimentaire dans les écoles. »

Peut-être que le super carré aux camerises concocté par Andrée Nolet pourrait servir d’arme de contamination massive…

* « Ensemble pour savourer les aliments à l’école », fait suite à un projet qui a également été soutenu par la TSHV de 2015 à 2017 : les cuisiniers et gestionnaires de services traiteurs ont pu suivre une formation gratuite de deux jours visant à les outiller dans la bonification de leurs recettes, notamment en utilisant de bons gras et des protéines végétales.

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