Malgré quelques améliorations, les choix alimentaires des Québécois demeurent préoccupants, constate l’Institut national de santé publique (INSPQ) dans une toute récente publication intitulée Les apports et les sources alimentaires de sucre, de sodium et de gras saturés chez les Québécois.
Les précédents portraits populationnels des apports nutritionnels au Québec portaient sur des données qui remontent à 2004. Et le nouvel état de la situation, que vient de réaliser l’INSPQ, vaut pour l’année 2015. Sachant que la consommation élevée d’aliments riches en sucre, en sodium et en gras saturés est associée au développement de plusieurs maladies chroniques, l’analyse de ces données est essentielle à la mise en place de mesures préventives axées sur les habitudes de vie.
Le sucre
Dans tous les groupes d’âge, l’INSPQ constate une diminution de la consommation de sucre au cours des 10 dernières années, et parfois même significative. Ainsi, chez les 1 à 3 ans, on enregistre une baisse de 21 %. Chez les garçons de 9 à 13 ans, la diminution est de 18 %, et chez ceux de 14 à 18 ans, elle est de 22 %. Cette baisse est certes la bienvenue, quoique ces 2 derniers groupes demeurent, et de loin, les plus gros consommateurs de sucre.
Globalement, le sucre fournit le quart (26 %) de l’apport énergétique des jeunes, ou 119 g par jour, et le cinquième (19 %) pour les adultes, ou 95 g par jour. Autrement dit, l’apport moyen en sucre des Québécois d’un an et plus est de 100 g par jour. Or, une proportion importante des sucres totaux sont des sucres « libres » et, sous cette forme, ils proviennent majoritairement des boissons sucrées (16 %) et des jus de fruits (10 %). Et ces sucres libres, autrement dit « ajoutés », lorsque consommés en trop grandes quantités peuvent occasionner divers problèmes de santé.
« En plus, du 26 % de sucre provenant des boissons sucrées et des jus, explique Céline Plante, conseillère scientifique à l’INSPQ et l’une des auteurs de l’étude, les sucres libres proviennent aussi du sucrier à la maison, des sirops et des confitures (7,4 %) sans oublier ceux contenus dans les recettes ou aliments transformés, tels que les biscuits et les gâteaux (8,3 %), les confiseries et le chocolat (5,2 %) ainsi que le pain (3,6 %). »
« Malheureusement, poursuit Céline Plante, nous ne pouvons pas indiquer la quantité exacte du sucre libre dans notre publication, car cette information n’est pas disponible dans la base de données. Par exemple on trouve du sucre libre dans des aliments qui contiennent à la fois des sucres naturels et des sucres ajoutés comme les yogourts aromatisés ou les compotes sucrées. Mais, grosso modo, on peut estimer que les sucres libres représentent environ la moitié des sucres totaux. »
Or, bien qu’il n’existe pas d’apport maximal tolérable (AMT) en matière de sucres totaux, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande néanmoins un apport réduit en sucres libres tout au long de la vie[1]. À cet égard, la situation pourrait être meilleure.
Le sel
Ici encore, dans tous les groupes d’âge, on note une diminution de la consommation de sel au cours des 10 dernières années. Mais nous partons de loin, car elle était jugée alarmante, en 2004, chez les enfants et les adolescents. Et malgré une certaine amélioration, les Québécois consomment en général beaucoup trop de sel. Selon les recommandations en vigueur, l’apport maximal tolérable de sodium devrait varier, selon l’âge, de 1 500 à 2 300 mg par jour.
Or, globalement, les Québécois d’un an et plus ont un apport moyen en sodium de 2 900 mg par jour. Chez les jeunes, de 1 à 18 ans, cette moyenne est de 2 572 mg par jour et chez les adultes de 2 978 mg par jour. Fait à noter, les garçons de 14 à 18 ans affichent une moyenne excessive de 3 734 mg par jour, et ce, en dépit du fait que leur consommation a connu une baisse de 20 % au cours des 10 dernières années.
Les gras saturés
L’apport en gras saturés a diminué au cours des 10 dernières années, parfois significativement, pour tous les groupes d’âge. On constate toutefois que, au chapitre de l’apport calorique, la contribution de ces gras est demeurée quasiment stable. En effet, les Québécois d’un an et plus en consomment en moyenne 25 g/jour, ce qui tout de même représente 11 % des apports énergétiques quotidiens. Or, bonne nouvelle ! Ces valeurs correspondent presque aux recommandations en la matière.
Vers une saine alimentation
Cette étude permet de mieux identifier les personnes à risque, de manière à orienter les interventions qui vont favoriser de meilleurs choix alimentaires. Elle sert en outre à identifier certains types ou groupes d’aliments susceptibles de contribuer, plus que d’autres, à des apports trop élevés en sucre, sel ou gras saturés. En ce qui concerne le sel, par exemple, on constate que les aliments transformés contribuent pour beaucoup aux apports quotidiens. Tandis que, pour le sucre, ce sont bien sûr les boissons sucrées qui représentent l’une des plus importantes sources de sucres libres.
Cette étude s’inscrit dans le cadre du mandat de surveillance continue de la nutrition de la population québécoise. Elle repose sur des données épidémiologiques populationnelles, qui sont essentielles à la planification, la mise en œuvre et l’évaluation de mesures préventives axées sur les habitudes alimentaires, et ce, dans le but d’éviter ou retarder l’apparition des maladies chroniques.
[1]L’OMS recommande un apport en sucres libres inférieur à 10 % de l’apport énergétique total chez l’adulte et l’enfant, et mentionne, du même coup, qu’il serait préférable pour la santé de réduire cet apport à moins de 5 %.
L’étude de l’INSPQ se base sur les données de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, conduite en 2015 par Statistique Canada, et dont la thématique était la nutrition (ESCC Nutrition 2015). Elle représente l’un des premiers jalons d’une collection de documents intitulée Regard sur l’alimentation des Québécois. L’ensemble s’adresse d’abord aux nutritionnistes, professionnels de la santé, chercheurs et professeurs universitaires, ainsi que les responsables de la mise en œuvre des politiques alimentaires, des programmes et des interventions en nutrition et de prévention des maladies chroniques. D’autres documents seront publiés au cours de l’automne 2019. À suivre...