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Vous avez entendu parler du concept de classe flexible, mais vous manquez d’informations pour passer à l’action ? Fruit d’un travail collaboratif exemplaire, un tout nouveau guide d’implantation est désormais à votre disposition. Ce document de référence, qui s’adresse à tous les acteurs et actrices du milieu scolaire, explique pourquoi et comment mettre en place une classe flexible.
La classe flexible, qui permet aux élèves de varier leurs postures corporelles et aux enseignants de dynamiser leur pédagogie, suscite un engouement grandissant, un peu partout dans le monde. Selon une étude descriptive, dirigée par un chercheur de l’UQAM et publiée en 2022, il y aurait au Québec, principalement dans les écoles primaires, plus de 2 000 classes offrant un environnement de type flexible.
La région de Québec et Chaudière-Appalaches fait figure de pionnière dans le domaine. « C’est une demande du milieu qui nous a incités, en collaboration avec un ergonome et des conseiller·ère·s pédagogiques, à élaborer le programme MA classe flexible, raconte Carole-Lynn Massie, kinésiologue et coordonnatrice de projets pour Hourra.ca*. En cinq ans, nous avons formé et accompagné plus de 200 enseignants et enseignantes du primaire et du secondaire souhaitant passer à l’action. »
Qu’est-ce qu’une classe flexible ?
La classe flexible se distingue d’une classe traditionnelle, dans laquelle les élèves sont, la plupart du temps, assis à leurs pupitres qui sont orientés vers l’enseignant·e. Dans un environnement flexible, les élèves peuvent choisir entre différentes postures de travail et d’écoute ergonomiques, en fonction de leurs besoins et de la nature de l’activité pédagogique en cours. Ils peuvent donc être, par exemple : couchés au sol sur un tapis, debout à une table haute ou au tableau, ou encore utiliser différents types d’assises, statiques ou dynamiques. Dans ces classes, les pupitres sont en général moins nombreux, mais leur retrait n’est pas une condition absolue.
La classe flexible ne se résume pas à un simple changement de mobilier. « L’enseignant doit accepter de modifier et varier ses pratiques pédagogiques notamment en y intégrant diverses occasions de mouvement, précise Carole-Lynn Massie. L’objectif est double : favoriser l’engagement des jeunes dans leurs apprentissages et diminuer leurs comportements sédentaires, c’est-à-dire être dans une position assise statique prolongée. Si les élèves ont accès à du mobilier attirant et confortable, mais qu’ils y sont assis la plupart du temps, on rate cette cible. »
La classe flexible : une avenue prometteuse pour réduire la sédentarité des jeunes
Or, la sédentarité est, depuis peu, associée à une augmentation du risque de maladies non transmissibles, comme les troubles cardiovasculaires et le diabète chez les adultes. Selon une récente publication de l’Organisation mondiale de la Santé, ce risque serait également présent chez les enfants et les adolescents. En outre, on sait maintenant que ce risque existe indépendamment de la pratique d’activité physique. Autrement dit, même si un jeune atteint les 60 minutes d’activité physique recommandées par jour, il n’est pas nécessairement à l’abri des risques associés à la sédentarité.
C’est à la lumière de ces données que le Guide d’implantation pour un environnement flexible au primaire et au secondaire prend tout son sens. Issu d’une fructueuse collaboration entre Hourra.ca et la Table intersectorielle régionale en saines habitudes de vie (TIR-SHV) Capitale-Nationale**, ce document explore en effet le potentiel des classes flexibles en matière de réduction des comportements sédentaires des jeunes. « Le soutien financier du ministère de l’Éducation du Québec et du ministère de la Santé et des Services sociaux, ainsi que l’efficacité de l’équipe qui a travaillé sur ce projet, nous ont permis de creuser cette question », constate Mariane Julien.
Un ambitieux projet pilote d’évaluation du programme MA classe flexible
Ce financement a notamment permis d’évaluer le programme MA classe flexible, grâce à l’expertise d’Alix Saint-Aubin, chargée d’enseignement en kinésiologie au département de médecine de l’Université Laval.« Au primaire, 10 classes flexibles et 10 classes traditionnelles ont pris part au projet, ainsi que 4 classes flexibles et 4 classes traditionnelles au secondaire, précise-t-elle. Nous avons utilisé des accéléromètres et fait des observations selon un protocole validé. » Les résultats ont été concluants.
« Avant cette évaluation, nous avions seulement des données empiriques sur les effets positifs de notre programme, souligne Carole-Lynn Massie. Ils sont maintenant documentés de façon rigoureuse. »
Des conseils et des outils pour passer à l’action
Dans la section « À considérer avant d’implanter des classes flexibles », le guide fournit plusieurs conseils aux acteurs et actrices du milieu scolaire afin de soutenir leur réflexion sur les classes flexibles et en guider la planification.
La section suivante propose une panoplie d’actions liées à l’aménagement physique de l’espace, aux différentes pratiques pédagogiques et à l’ergonomie. Des illustrations et des tableaux permettent d’apprivoiser concrètement les aspects d’une classe flexible. Carole-Lynn Massie insiste toutefois sur un point essentiel : « Il n’y a pas de solution standard pour rendre une classe plus flexible, souligne-t-elle. Ce n’est pas une recette, c’est une démarche que chaque enseignant peut faire à sa façon et à son rythme et aussi, bien entendu, en fonction des moyens dont il dispose ».
Un travail d’équipe exceptionnel
« Malgré l’impact majeur de la pandémie, l’équipe ne s’est jamais découragée », souligne avec fierté Mariane Julien. Au contraire, plutôt que de patienter durant une période où l’accès aux classes n’était plus possible, l’équipe a choisi de réaliser, à l’aide d’un collaborateur expert, une revue de type exploratoire (scoping review) sur l’aménagement de classes flexibles et d'autres interventions visant à diminuer les comportements sédentaires en classe. Cette revue scientifique a non seulement enrichi le corpus de données probantes, mais elle a aussi permis de bonifier les outils d’évaluation lorsque l’équipe a pu retourner dans les classes.
Les trois personnes interviewées pour cet article ont toutes souligné la chimie et l’efficacité de l’équipe, qui comptait cinq membres, ainsi que plusieurs collaborateurs externes. « Nous formions une super équipe, la Dream team, comme nous nous appelions entre nous ! confie Alix St-Aubin. Les objectifs étaient très ambitieux, mais la conviction profonde que ce projet était important pour l’avenir des élèves et la promotion des saines habitudes de vie nous a servi de carburant pour aller au bout de nos possibilités ! ».
Un rayonnement remarquable
En mai 2022, des données préliminaires du projet d’évaluation ont été présentées au 91e congrès de l’Acfas. Le projet sera également présenté lors du Colloque scientifique francophone sur la promotion de la santé en milieu scolaire, qui se tiendra à Paris du 30 novembre au 1er décembre prochains.
* Hourra.ca a pour mission de former, d’accompagner et d’outiller les différents intervenants scolaires dans l’intégration quotidienne d’activité physique pour les élèves.
** Le nom exact de cette TIR-SHV est : Mobilisation régionale et locale sur les saines habitudes de vie, le poids et la santé de la Capitale-Nationale
Cet article a été publié dans le cadre d'un partenariat avec le Collectif TIR-SHV.