Saine alimentation

Briser les silos pour transformer le système alimentaire régional de Québec

Briser les silos pour transformer le système alimentaire régional de Québec

En collaboration avec de nombreux partenaires, une équipe interdisciplinaire de l’Université Laval travaille à dresser un portrait du système alimentaire de la région de Québec. Contexte et entrevue.

De plus en plus de pays et de villes se penchent sur les impacts sociaux, économiques et environnementaux de leur système alimentaire. Bien que cette réflexion soit menée de différentes façons à travers le monde, les préoccupations sont les mêmes : comment rendre ce système plus sain, plus local et plus durable ?

Région de la Chaudière-Appalaches

De la terre à l’assiette : tout un parcours

Il existe des définitions plus ou moins détaillées du système alimentaire. En voici une courte :

Le système alimentaire constitue le parcours des aliments du champ à la table jusqu’à l’élimination des déchets qu’ils génèrent. Il inclut donc les étapes suivantes :

  • Production
  • Transformation et emballage
  • Transport et distribution
  • Mise en marché et vente au détail
  • Consommation
  • Gestion des surplus et des déchets.

(Pour lire la définition longue retenue par l’équipe de recherche de l’Université Laval c’est ici.)

Marché de Sainte-Foy – Crédit photo :  N. Delucinge

Un système complexe

Analyser et transformer un système alimentaire représente un travail de grande envergure qui demande du temps et des ressources. Cette démarche complexe repose en effet sur la mobilisation de l’ensemble des partenaires du palier local et régional ainsi que sur une collaboration étroite entre le secteur public, le secteur privé, les organismes communautaires et les citoyens.

Point de chute de la coopérative agricole La Mauve à Limoilou – Crédit photo : Sarah Pezet

La contribution du milieu de la recherche est un atout de taille dans ce processus. Voilà pourquoi, depuis le printemps 2016, le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) finance le projet « Vers une alimentation territorialisée et durable : une recherche participative pour comprendre le système alimentaire de Québec (REPSAQ) ».

100 degrés a réalisé une entrevue avec Manon Boulianne, chercheure responsable du projet et Pauline Bissardon, coordonnatrice. Elles sont respectivement professeure titulaire et professionnelle de recherche au Département d’anthropologie de l’Université Laval.

Manon Boulianne – Crédit photo :  J. Proteau

100°. Pourquoi se pencher sur le système alimentaire pour le rendre plus local et plus durable ?

Manon Boulianne. De nombreuses villes et régions le font partout dans le monde, notamment pour être plus autosuffisantes sur le plan alimentaire, aux cas où les longues chaînes d’approvisionnement seraient compromises par des désastres liés aux changements climatiques. On sait également que l’agriculture industrielle et le transport des aliments sur de longues distances ont des effets néfastes sur l’environnement, qui ne sont pas pris en compte dans le calcul de leur coût global réel pour la société.

Pauline Bissardon

Pauline Bissardon. L’alimentation touche aussi plusieurs aspects sociaux, économiques et de santé cruciaux. Un système alimentaire juste et local devrait rendre les aliments sains accessibles à tous, tant au plan financier, que géographique, ce qui n’est pas le cas en ce moment. L’amélioration du système alimentaire est aussi liée, par exemple, à la pérennité des petites fermes et à l’occupation dynamique du territoire.

Côte-de-Beaupré – Crédit photo : J. Proteau

Pourquoi mener une recherche participative ?

Manon Boulianne. Ce type de collaboration entre le milieu de la recherche et les acteurs du terrain est particulièrement pertinent pour étudier le système alimentaire, car les parties prenantes sont nombreuses et disposent chacune d’expertises spécifiques utiles à la compréhension d’ensemble. Dans ce cas, on parle d’une vingtaine d’organisations locales ou régionales issues des secteurs municipal, communautaire et privé, mais aussi de la santé publique et de la société civile.

Rencontre de maillage du REPSAQ, septembre 2015 – Crédit photo : E. Drapeau

Pauline Bissardon. En outre, les chercheurs ont besoin de tous les acteurs du terrain pour bien identifier les enjeux prioritaires et faire un diagnostic pertinent. En participant à la collecte des données et à leur analyse, ces acteurs peuvent s’approprier les résultats de la recherche et les utiliser pour passer à l’action.

Quel territoire le REPSAQ couvre-t-il ?

Manon Boulianne. Pour la Communauté métropolitaine de Québec (CMQ), les territoires de production de proximité identifiés sont les régions de la Capitale nationale et de la Chaudière-Appalaches. La mise en place de dispositifs de gouvernance alimentaire dans chacun de ces territoires administratifs est essentielle pour pérenniser les efforts de concertation en cours.

Qui sont les chercheurs et les partenaires du REPSAQ ?

Manon Boulianne. L’équipe de l’Université Laval se compose de cinq professeurs-chercheurs, deux professionnelles de recherche et de huit étudiants. Cinq partenaires collaborateurs issus du terrain et neuf autres organisations régionales complètent le comité de partenaires.

Ces nombreux partenaires ont-ils été difficiles à mobiliser ?

Manon Boulianne. Non, la mobilisation s’est mise en place en quelques mois et la majorité des organisations que nous avons invitées se sont jointes au REPSAQ. On sent un intérêt fort pour ces questions et une volonté de travailler en concertation. Malheureusement, deux secteurs du système alimentaire sont moins représentés, soit la transformation et la distribution au détail.

Région de la Chaudière-Appalaches

Pauline Bissardon. Le REPSAQ est arrivé à un moment opportun. En effet, une entente sectorielle a été conclue au printemps 2017 entre la CMQ, le Forum régional des élus et le MAPAQ. Des projets visant le secteur agroalimentaire régional sont donc en cours. Les objectifs sont un peu différents, mais les deux démarches se nourrissent mutuellement. Autre exemple : le concept des villes nourricières, lancé au Québec en 2015 par Vivre en ville, est une tendance forte, ainsi que le désir des consommateurs d’acheter des aliments plus locaux.

Restaurant à Saint-Sauveur  – Crédit photo : J. Proteau

Quels sont les différents volets de recherche du REPSAQ ?

Manon Boulianne. Ils portent, entre autres, sur le potentiel productif du territoire et la concordance entre production et consommation dans les régions à l’étude. Nous étudions également les trajets parcourus par certains aliments, les habitudes d’achat des ménages de la CMQ, les freins à l’approvisionnement de proximité, le cadre réglementaire de l’agriculture urbaine, ainsi que la gestion des résidus alimentaires et le gaspillage alimentaire.

 

Rencontre de maillage du REPSAQ, septembre 2015  – Crédit photo : E. Drapeau

Pauline Bissardon. L’un des objectifs principaux de ce projet est de fournir un ensemble de données fiables et pertinentes qui permettront à toutes les parties prenantes, y compris le milieu municipal, de prendre des décisions cohérentes au sujet des enjeux liés à l’alimentation.

Rendez-vous des partenaires du REPSAQ, octobre 2017  – Crédit photo : J. Proteau

Manon Boulianne. Un premier Rendez-vous des partenaires a eu lieu le 4 octobre dernier : une trentaine de personnes y ont assisté. Ce projet présente tout un défi! Le dynamisme et la transdisciplinarité de notre équipe, de même que l’intérêt senti des partenaires, rendent l’expérience unique et captivante.

Site web : REPSAQ

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