L’accès de proximité à des produits alimentaires de base est un service essentiel à la survie d’un village. Pourtant, plusieurs petites localités éloignées du Québec ne bénéficient plus de ce service de base. Pour remédier à cette problématique, la MRC de Maria-Chapdelaine a mis sur pied une démarche innovante et unique de comptoirs solidaires à Sainte-Élisabeth-de-Proulx, Saint-Augustin, Notre-Dame-de-Lorette et Saint-Stanislas.
Le territoire de la MRC de Maria-Chapdelaine est très étendu et compte plusieurs petites communautés reculées, avec une population de moins de 400 habitants. Dans ces milieux ruraux, le modèle d’affaires privé ne fonctionne plus pour les dépanneurs et les petites épiceries de villages ; les ventes sont trop basses et les coûts d’opération sont trop élevés. Résultat : quatre des municipalités de la MRC n’ont plus accès à un service alimentaire de proximité. Éloignées des grands centres, ces municipalités sont devenues de réels déserts alimentaires, auxquelles les solutions des grandes villes ne peuvent pas s’appliquer.
Refusant de baisser les bras devant cette situation, l’équipe de l’organisme communautaire le Garde Manger a mis sur pied en 2015, avec la participation des citoyens et des conseils municipaux, une réponse adaptée aux besoins de ces milieux : les comptoirs solidaires. Objectif : développer un service alimentaire alternatif de proximité, afin d’assurer l’accessibilité à une saine alimentation pour toute la communauté.
« Les comptoirs sont un service particulièrement important pour les personnes âgées, les personnes à mobilité réduite ou les personnes qui n’ont tout simplement pas de véhicule, explique Rémi Therrien, coordonnateur de l’épicerie communautaire Le Garde-manger. »
Le Garde Manger est un organisme à but non lucratif qui opère une épicerie communautaire à Dolbeau-Mistassini. Sa mission est de soulager la pauvreté, de contribuer à la saine alimentation et à la sécurité alimentaire des personnes démunies de la MRC de Maria-Chapdelaine, dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean.
En l’absence d’un modèle d’affaires privé, quels sont les coûts ?
Pour démarrer le projet de comptoirs solidaires, le Garde Manger a fourni 2000 $ de produits de base et trouvé du financement pour acheter le matériel nécessaire à son fonctionnement (réfrigérateurs, étagères, caisse enregistreuse, etc.).
Le local et l’électricité sont fournis par la municipalité et les comptoirs sont opérés par des bénévoles de la communauté. Avec ce système, il n’y a pas de coût de gestion ni de frais fixes ; les comptoirs sont donc en mesure de vendre des produits alimentaires diversifiés, frais à un prix très abordable.
Chaque dollar dépensé dans le village reste dans le village : tous les profits sont réinvestis dans la bonification des services du comptoir et dans la communauté (amélioration des espaces verts, achat de livres pour la bibliothèque, etc.). Ce réinvestissement revitalise le secteur et dynamise la municipalité.
Pas juste un comptoir alimentaire, un comptoir solidaire !
Les comptoirs sont ouverts en moyenne de 10 à 15 heures par semaine (généralement échelonnées sur 4 ou 5 jours), selon les disponibilités des bénévoles et les besoins des citoyens.
Les comptoirs sont tous équipés d’un espace café, pour favoriser les rencontres et briser l’isolement. Des voisins se découvrent… après vingt ans !
Tous les comptoirs sont également équipés de cuisines, ce qui permet de réduire considérablement les pertes alimentaires. On y organise des activités de cuisine collective et de dégustation de nouveaux produits, ce qui permet aussi de conserver l’attrait de la nouveauté.
Quels produits retrouve-t-on dans les comptoirs ?
- Des denrées alimentaires de base (conserves, farine, pâtes, riz, etc.), ainsi que des produits frais (fruits et légumes, produits laitiers, œufs, viande, etc.) ;
- En saison, les surplus de fruits et légumes des producteurs locaux et des jardins communautaires ;
- Des mets préparés par des bénévoles dans la cuisine, qui prennent en considération les goûts de la communauté ;
- Des articles artisanaux fabriqués par les citoyens : planches à découper, écharpes, nappes, linge à vaisselle, bas de laine, bijoux, poterie, etc.
Des conditions gagnantes
Rien n’est laissé au hasard et tout le processus est bien organisé : les cuisines collectives ont des permis du Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) et les bénévoles ont suivi une formation en hygiène et salubrité alimentaire.
De plus, l’association avec certains partenaires clés facilite grandement la démarche :
- La présence d’un organisme communautaire local, fiduciaire. Ce qui veut dire que le comptoir est un service attaché à un organisme et ne nécessite pas toute la paperasse reliée à la fondation d’un OBNL ;
- Le recrutement des partenaires financiers (MRC, Municipalité, Caisse Populaire, etc.) pour acheter le matériel ;
- La participation d’un comité de bénévole solide et impliqué.
De nombreuses retombées positives
Pour la communauté de la MRC de Maria-Chapdelaine, les retombées sont multiples et dépassent l’accès abordable à la saine alimentation !
Les comptoirs solidaires permettent de rejoindre les personnes démunies, vulnérables ou à mobilité réduite des petites communautés et de briser l’isolement. Ils permettent aussi d’augmenter le potentiel du maintien à domicile des personnes âgées (rétention de la population), tout en assurant l’occupation du territoire de la MRC.
Chacun à leur manière, les comptoirs sont uniques : ils sont à l’image des communautés qui les ont mis sur pied et répondent donc directement à leurs besoins ! Tout le monde y met la main à la pâte, ce qui stimule la participation citoyenne et le développement solidaire.
L’offre de service diversifiée des comptoirs permet de revitaliser le secteur et de soutenir l’économie locale ; les voisins se rencontrent autour d’un café et la vente de produits artisanaux permet la découverte de talents cachés dans la communauté !
Pour plus d’informations sur les comptoirs solidaires, visitez le site web de l’Épicerie communautaire Le Garde Manger.
** Ce projet a été présenté dans le cadre des Journées annuelles de santé publique 2017.