La mise en place d’une taxe québécoise sur les boissons sucrées représente une mesure de santé publique prometteuse dans le but d’en diminuer la consommation, de contribuer à la saine alimentation et de lutter contre l’obésité, conclut un nouveau rapport de l’INSPQ.
L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), dans son rapport, Analyse d’une politique publique ; la taxation des boissons sucrées, s’est penché sur les effets d’une telle mesure en matière de santé publique. À partir d’un modèle logique, les auteures du rapport ont identifié 4 mécanismes potentiels pour expliquer ces effets : comportement, dénormalisation, reformulation et fiscalité[1].
Si les études empiriques disponibles montrent une diminution de l’achat de boissons sucrées après la mise en place d’une taxe (le plus souvent une taxe d’accise) les données disponibles ne permettent pas de conclure à quelle(s) logique(s) d’action il est possible d’attribuer cet effet. Bien sûr, l’effet de la taxe (augmentation du prix de vente) sur la logique comportementale a souvent été étudié. Mais on ne peut exclure de cette équation une prise de conscience du consommateur (logique de dénormalisation) ou encore une réduction de la quantité de sucre dans les produits pour se soustraire à la taxe (logique de reformulation, propre à l’industrie).
À ce chapitre, le rapport suggère que ces deux dernières logiques d’action sont susceptibles d’émerger à plus long terme que la logique comportementale, qui procède le plus souvent d’une réaction immédiate. Cela dit, la mise en place de mesures complémentaires peut amplifier l’effet de la taxe en raison, par exemple, de la logique de dénormalisation. C’est les cas du Mexique, de la Hongrie ou encore de la ville Berkeley (Californie) où d’autres interventions, dans le cadre de stratégies plus larges de promotion de la santé, accompagnaient la mise en vigueur de la taxe, qu’il s’agisse de campagnes d’information ou encore de l’imposition de taxes sur d’autres produits alimentaires jugés néfastes.
La bonne taxe sur le bon produit
Sur la base des études empiriques, le rapport fait aussi valoir que les modalités de taxation (taxe de vente ou d’accise, taux plus ou moins élevé, type de boissons ciblées) peuvent jouer un rôle important en matière d’achat des boissons sucrées, mais aussi des produits de substitution, sans oublier de mentionner les questions d’équité ainsi que le cumul des revenus générés. En conséquence, les auteures préviennent que des objectifs de taxation doivent être clairement définis et classés par ordre d’importance avant même la conception d’une taxe sur les boissons sucrées.
Fait à noter, la plupart des juridictions où les effets de la taxe sur la santé ont été documentés appartiennent au groupe des pays développés. Autrement dit, tant au niveau politique, juridique qu’économique, ces juridictions sont comparables à celle du Québec et peuvent donc offrir des exemples facilement transposables dans notre réalité.
Des limitations, mais…
Bien que les écrits scientifiques sur les effets empiriques de la taxation des boissons sucrées se multiplient depuis les dernières années, ils demeurent encore trop peu nombreux et la robustesse de leurs conclusions est souvent variable. Par exemple, si les effets sur les achats de boissons sucrées sont assez bien connus, c’est moins le cas en ce qui concerne leur consommation proprement dite, les données disponibles ne suffisant pas à tirer des conclusions vraiment claires.
Cela dit, dans le cadre d’une approche intégrée qui vise à diminuer la proportion de sucres libres dans l’alimentation, les données montrent que la taxation des boissons sucrées offre une avenue prometteuse. D’ailleurs, dans un communiqué qu’elle vient de faire paraître, la Coalition québécoise sur la problématique du poids rappelle la récente publication d’un rapport du World Cancer Research Fund International dans lequel on réaffirme justement la pertinence, en matière de santé publique, de l’implantation une taxe sur les boissons sucrées. À l’évidence, il est maintenant temps de passer à la logique de l’action…
[1]La logique fiscale est le 4eterme du modèle logique développé par les auteures de l’étude. Toutefois, les effets sur la santé de l’utilisation des revenus générés par la taxe n’ont pas encore été documentés.
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