Ressource
Le système de santé québécois est parvenu à un tournant de son histoire. Voire… un point de non-retour. Avec le vieillissement de la population, l’augmentation des maladies chroniques liées au mode de vie, les inégalités sociales et les changements climatiques, le temps est venu d’effectuer un changement de cap majeur. Et voici comment !
Vers un plan stratégique de réduction de la maladie : 4 leviers incontournables. Voilà ce que propose la Coalition québécoise pour la réduction de la maladie. Fruit de la mobilisation sans précédent de 57 organismes nationaux, ce document jette les bases d’une stratégie de prévention et de réduction de la maladie pour notamment relever les défis auxquels est confronté le réseau de santé et de services sociaux du Québec.
Un état de fait dont prenait acte le ministre de la Santé, M. Christian Dubé, le 1er novembre 2024, en mandatant le directeur national de la santé publique, Dr Luc Boileau, pour qu’il lance des consultations devant mener à l’élaboration d’une Politique nationale de la prévention au printemps 2025. Et c’est dans cette foulée que la Coalition vient de rendre public son plan de prévention.
L’urgence d’agir en prévention et en réduction de la maladie
« La situation actuelle est intenable, soutient Thomas Bastien, directeur général de l’ASPQ (organisation qui chapeaute d’ailleurs cette Coalition). La situation; elle est intenable pour les patients. Elle est intenable pour les personnes qui œuvrent à l’intérieur du réseau. Et elle est intenable pour l’État. Tout le monde en convient. »
De fait, en 2004, le budget de la santé au Québec se chiffrait à 22 milliards de dollars. En 2018, il avait presque doublé, à 40 milliards. Et, en 2024, il s’élevait à 60 milliards, plus de la moitié du budget de l’État. « Le réseau de la santé est malade, lance Thomas Bastien. Et ça explique sans doute pourquoi notre mobilisation a rallié tant d’organisations, aussi rapidement, pour se porter à son chevet. Des gens qui, comme nous, appellent de leurs vœux un ministère de la Santé 2.0. »
Les 4 leviers de la réduction de la maladie au Québec
La Coalition a méticuleusement travaillé à l’élaboration de ce plan stratégique de prévention et de réduction de la maladie. Thomas Bastien insiste même pour dire que les recommandations qu’il contient vont au-delà du consensus. « En fait, précise-t-il, l’objectif était d’en arriver à définir le dénominateur commun de tous les acteurs autour de la table. Sans compromis. Nous avons analysé tous les éléments pour finalement ne retenir que ceux qui nous rassemblent. Nous parlons d’une seule voix. »
Les quatre piliers fondamentaux de ce plan sont les suivants :
- Réinvestir massivement pour la réduction de la maladie, en augmentant les budgets alloués à la prévention et à la promotion de la santé.
- Miser sur les données, afin que l’évolution des maladies soit accessible et compréhensible par le grand public et qu’il soit possible de se doter d’objectifs précis en matière de réduction.
- Gouverner la santé et non la maladie, en renforçant notamment la Loi sur la santé publique, en favorisant la participation citoyenne et la littératie en matière de santé.
- Favoriser une culture d’innovation en matière de prévention et de promotion de la santé et collaborer avec les milieux de l’innovation sociale, de l’entrepreneuriat et de l’intelligence artificielle pour soutenir les efforts de prévention.
Quand le préventif vient au secours du curatif
Albert Einstein, dit-on, aurait affirmé : « La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent ». Nous en sommes là. Le statu quo n’est plus une option. Notre système de santé croule sous la pression. Il ne peut plus compenser nos lacunes en matière de prévention de la maladie. Nous n’avons qu’un seul choix : enrayer cette spirale infernale.
Justement. Parmi les 57 organismes nationaux membres de la Coalition, on dénombre plusieurs associations professionnelles œuvrant en milieu clinique. Un signe qui ne trompe pas ! Et qui annonce un changement de paradigme. « Les cliniciens, au niveau curatif, explique Thomas Bastien, ce qu’ils souhaitent aussi, c’est avoir le temps de bien traiter leurs patients. Et les ressources pour le faire efficacement. Ils savent que, si on travaille en amont pour réduire la pression sur le système, ils seront en mesure d’offrir de meilleurs soins. »
La santé de la population : une source de richesse
« Cette Coalition, poursuit Thomas Bastien, rassemble les acteurs qui sont en conversation constante avec le cabinet et avec les équipes du système de santé. Car, si on veut qu’un système change, il faut d’abord que ça se fasse de l’intérieur. Mais ensuite, il faut élargir cette mobilisation à l’ensemble de la société. D’autres personnes réalisent désormais l’importance de la santé, notamment les entrepreneurs et bien sûr le milieu de l’économie sociale. Et si on leur montre qu’il y a un chemin qui peut être suivi, les gens vont embarquer dans la démarche pour prévenir la maladie. »
Mais pour le moment, il faut s’affairer à paver la voie. Et le chantier ne fait que débuter. « Il ne faut pas qu’on lâche, soutient Thomas Bastien. Il faut qu’on maintienne le cap. Il faut qu’on maintienne la cadence. Non. Il faut même qu’on accélère la cadence. Parce que la plus grande richesse du Québec, c’est la santé de sa population. Si on investit et si on innove pour améliorer la santé de sa population, on va récolter des bénéfices directs pour notre économie, pour notre productivité, pour la qualité de vie de la population. Et on va réduire les coûts de notre système de santé. »