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Depuis plus de 20 ans, le programme Bien dans mes baskets utilise la pratique du basketball parascolaire comme outil d’intervention et de prévention auprès des jeunes de l’école secondaire Jeanne-Mance. Grâce à plusieurs initiatives visant à mieux répondre aux besoins de la clientèle féminine, de plus en plus de filles font partie des équipes des Dragons. Mais pour Martin Dusseault, initiateur et coordonnateur du programme au CIUSSS-CSM, pas question d’en rester l ! Cette année, l’équipe d’intervenants sociaux a mis sur pied le projet Rebondir au féminin. Ce projet ambitieux, spécialement conçu pour les jeunes Dragonnes, vise à lever tous les freins qui pourraient les empêcher de développer leur plein potentiel par le sport.
Lever tous les freins à la pratique sportive des filles
On sait que l’abandon de l’activité physique et sportive est particulièrement marqué chez les filles vers l’âge de 15 ans. À la fin du secondaire, 9 filles sur 10 ne répondent pas aux normes canadiennes en matière d’activité physique. Préoccupée par ce désengagement, l’équipe de BdmB a entrepris, à l’automne 2021, une intense réflexion pour identifier tous les freins à la pratique du sport chez les filles et concevoir autant d’actions d’intervention pour entretenir la flamme du basket chez leurs joueuses féminines. Dès janvier, le projet pilote Rebondir au féminin a été mis en œuvre grâce au soutien financier de la Fondation Santé Urbaine. Déjà les nombreux effets bénéfiques de ce projet innovant, qui se décline en 5 volets répondant chacun à un objectif précis, se font sentir sur la mobilisation et le développement social des adolescentes.
1- Développer la conscience de soi
Comme le rapporte Martin Dusseault, depuis la pandémie, les intervenants sociaux du programme BdmB ont observé une importante augmentation de l’anxiété et des demandes d’aide, particulièrement chez les adolescentes. « On s’est rendu compte, précise-t-il, que les filles avaient moins de facilité à gérer leur anxiété. Même le gymnase les stresse, contrairement aux garçons qui s’y défoulent. » Pour aider les adolescentes à diminuer leur anxiété, l’équipe du projet Rebondir au féminin a eu l’idée d’allier le yoga au basketball. Chaque équipe féminine des Dragons a ainsi pu bénéficier de 10 séances de yoga avec une entraîneure professionnelle, axées sur la respiration, l’écoute de son corps et la connaissance de soi. L’objectif étant que les joueuses se centrent davantage sur leur propre ressenti que sur l’image qu’elles projettent.
2- Équiper
L’équipe de BdmB a également constaté que le fait de ne pas avoir de souliers confortables ou de soutien-gorge adapté, comme un soutien-gorge athlétique, freine plusieurs filles dans leurs élans sportifs. Certaines ressentent un réel inconfort avec leur poitrine et ne savent pas comment gérer ça. Le projet Rebondir au féminin a donc permis aux intervenantes d’aborder ce sujet avec les jeunes filles, de cibler les sportives dans le besoin et de créer un fonds d’urgence pour leur acheter l’équipement nécessaire. Dans l’avenir, BdmB compte maintenir ce fonds et garder sous la main de l’équipement adapté aux sportives féminines.
3- Oser prendre des risques
L’une des grosses activités du projet Rebondir au féminin a été une sortie en plein air avec les 45 participantes du programme. L’objectif était d’amener les filles à sortir de leur zone de confort et à vivre de la prise de risques dans un endroit sécuritaire pour qu’elles réalisent qu’elles ont en elles les capacités de réussir et de se surpasser. Organisée dans un camp de Lanaudière avec le Centre des Ils et des Elles de Boucherville, spécialisé en santé mentale jeunesse, la journée a donné l’occasion aux filles d’escalader une montagne en raquettes, de parcourir une piste d’hébertisme, de rouler en fat bike et surtout d’affronter leurs peurs en créant des liens privilégiés avec les autres membres de leur équipe.
« Cette journée nous a permis de voir nos capacités dans des situations d'urgence et de développer le travail d'équipe. De retour sur le terrain de basketball, on était plus soudées parce qu'on a compris comment travailler en équipe », témoigne Cloé Goyette, étudiante en secondaire 2.
4- Valoriser
C’est en cherchant des photos pour illustrer un article de 100° que Martin Dusseault a réalisé qu’il avait peu de photos des équipes féminines des Dragons. « On photographie les gars plus souvent parce qu’ils participent à des compétitions de haut niveau, explique-t-il. Et dans les médias, 95 % de la couverture sportive est dirigée vers les hommes. Je me suis dit qu’il fallait tout au moins valoriser la pratique sportive au féminin à l’intérieur de notre école. »
Aussitôt pensé, aussitôt fait ! Toutes les équipes féminines des Dragons ont reçu la visite d’une photographe professionnelle pendant une de leur pratique et un de leur match, puis chacune des joueuses s’est prêtée à une séance de photo individuelle. Ces photos seront affichées à l’intérieur de l’école et cet article est une belle occasion de les présenter.
5- Inspirer
Il y a aussi toute la question de l’estime de soi. « Ça fait plusieurs années qu’on note qu’elle n’est pas très développée chez nos filles », confie Martin Dusseault. Le projet Rebondir au féminin inclut donc des activités de modélisation pour inciter les filles à observer les comportements de personnes-ressources pour se les approprier et prendre confiance. C’est ainsi que les jeunes joueuses de l’école Jeanne-Mance ont eu la chance de se rendre à l’Université du Québec à Montréal pour échanger avec l’entraîneuse et les athlètes de l’équipe féminine de basketball des Citadins. Les Dragonnes ont ensuite été invitées à assister à un match pour voir évoluer les athlètes de niveau universitaire. Ces modèles de réussite d’athlètes étudiantes ont eu un impact manifeste sur la motivation et la confiance des jeunes filles en leurs capacités.
Rebondir au féminin
D’autres rencontres avec des modèles de leadership féminin dans les domaines communautaire, social ou politique sont également prévues d’ici la fin de l’année scolaire. Enfin, pour mettre la touche finale au projet Rebondir au féminin, les jeunes filles partageront une soirée festive avec d’anciennes Dragonnes qui se réalisent aujourd’hui dans leur vie familiale ou au travail, quel que soit le secteur d’activités qu’elles ont choisi. « Ce sont des femmes souvent issues des communautés culturelles, qui viennent du même quartier que nos jeunes et qui ont vécu les mêmes choses qu’elles, souligne Martin Dusseault. On veut ainsi les amener à se projeter dans 4 ou 5 ans pour voir ce qu’elles doivent faire dès aujourd’hui pour atteindre leurs objectifs. »
Une étude sur l’empowerment des filles, menée en 2011 par Stéphanie Simard et dirigée par Suzanne Laberge, professeure titulaire au département de kinésiologie de l’Université de Montréal, démontrait clairement que la qualité des relations et l’aspect social et plaisant du programme BdmB jouaient un rôle déterminant dans l’adhésion des filles à la pratique du basketball. En offrant aux filles encore plus d’occasions d’être ensemble, on ne peut douter que le projet Rebondir au féminin atteindra tous ses objectifs et contribue, au-delà du sportif, au développement chez ces adolescentes d’habiletés précieuses pour toute la vie.
« Le projet s’appelle Rebondir au féminin, précise Martin Dusseault. Bien sûr, le mot “rebondir” fait référence au ballon de basket. Mais c’est surtout la signification psychosociale de ce verbe qui donne tout ce sens au projet. Il ne faut pas arrêter de créer, d’innover, de penser des façons différentes de travailler avec nos jeunes, parce que la société évolue. Notre mission première demeure d’aider les jeunes filles à développer des habiletés sociales qui vont faire qu’à travers leur parcours, elles vont avoir les bons outils pour fonctionner dans la société. »
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