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Alors que l’importance de reconnecter les enfants avec la nature est de plus en plus reconnue au Québec, la MRC des Appalaches n’a pas hésité à entreprendre un grand virage vers la pédagogie en plein air, en misant sur l’approche de la coopérative Enfant nature. En moins de deux ans, ses centres de la petite enfance, ses garderies en milieu familial, ses maternelles et ses organismes communautaires ont intégré cette approche pédagogique axée sur l’exploration libre, active et créative en interaction avec la nature.
Pilotée par Jézabel Amesse, agente de promotion des saines habitudes de vie au Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Chaudière-Appalaches, ce projet mobilisateur démontre comment toute une communauté peut s’unir pour assurer le mieux-être de ses enfants.
Tout commence au printemps 2019, alors que Sylvie Gervais reçoit une invitation de Jézabel Amesse à présenter la pédagogie Enfant nature, lors d’une journée de réseautage consacrée aux intervenantes en petite enfance de la région. Diplômée en éducation physique et formée à la pédagogie nature auprès de Claire Warden, en Écosse, Sylvie Gervais offre depuis plusieurs années son expertise en formation et a accompagné de nombreuses garderies, CPE et écoles primaires dans le déploiement de la pédagogie nature au Québec. « J’appelle ça l’effet tsunami, déclare d’entrée de jeu Jézabel Amesse. Dès la présentation de la conférence sur Enfant nature, il y a eu un énorme engouement des partenaires pour cette approche pédagogique. »
À l’automne 2019, une première cohorte regroupant 28 intervenantes issues des principaux CPE de la MRC, de plusieurs services de garde en milieu familial et de l’organisme communautaire Le Réseau d’entraide des Appalaches a été formée à la pédagogie Enfant nature. Comme l’explique Sylvie Gervais, « dès la première formation, les éducatrices ont tout le matériel pédagogique en main, composé entre autres d’un cartable avec les histoires destinées aux enfants, et accès à des capsules en ligne pour intégrer ce modèle d’intervention à leur rythme, dans leur milieu. » Les intervenantes et les éducatrices sont également accompagnées lors de rencontres en personne et de webinaires pour aller plus loin.
La nature, de la petite enfance à l’entrée à l’école
Quelques mois plus tard, en pleine pandémie, Karine Landry, qui a adopté la pédagogie Enfant nature dans sa classe de maternelle à l’école du Saint-Nom-de-Jésus de Beaulac-Garthby, présente un atelier sur cette approche à toutes les enseignantes du préscolaire du Centre de services scolaire des Appalaches. Nouveau tsunami ! Nouvel engouement ! « Ça faisait quelques années qu’on en parlait au Centre de services scolaire, mais il n’y avait pas un réel mouvement d’adhésion, précise la directrice du service éducatif Sonia Roberge. Mais avec la pandémie, les enseignantes ont possiblement pu constater par elles-mêmes comment le plein air permet aux enfants d’apprendre différemment. »
Alors que le Centre de services scolaire propose de contribuer financièrement à la formation, trente enseignantes sont formées à la pédagogie Enfant nature au printemps 2020, puis dix autres au début de cette année. En tout, 15 écoles primaires sur 16 qui offrent le préscolaire dans la région valorisent aujourd’hui le jeu libre et l’environnement naturel comme contexte éducatif. Avec les éducatrices formées dans les CPE et les garderies, le projet touche près de 600 enfants d’âge préscolaire et 1200 parents.
Sonia Roberge se réjouit que le nouveau programme-cycle de l’éducation au préscolaire du ministère de l’Éducation insiste sur le développement global de l’enfant. Avec la pédagogie nature, explique-t-elle, « on développe le sensoriel, le kinesthésique et le monde imaginaire de l’enfant et on prend le temps de le préparer à ce qu’il devra apprendre plus tard. » En adoptant cette pédagogie expérientielle en plein air qui combine le plaisir avec l’apprentissage, la directrice des services éducatifs précise que le projet répondait à une visée à long terme. « Ça va grandir avec les élèves et les écoles, ajoute-t-elle. Nous avons mis en place un comité qui travaille sur la transition pour s’assurer de continuer à offrir aux enfants un environnement stimulant d’apprentissage tout au long de leur parcours scolaire. »
Une communauté tissée serrée pour l’avenir de ses enfants
Le projet Enfant nature a pu compter sur une mobilisation sans précédent de toute la région. Plusieurs institutions, dont Desjardins, le Fonds de développement des territoires de la MRC, l’organisation PRÉCA pour la réussite éducative et l’Unité régionale de loisir et de sport de la Chaudière-Appalaches, ont soutenu financièrement la mise sur pied du programme ou l’achat de matériel de plein air. Les municipalités, les Sentiers pédestres des 3 Monts et la station touristique du Mont Adstock ont également contribué à sa réalisation en facilitant, par exemple, l’accessibilité aux parcs et aux espaces verts de proximité. « On a tissé une toile solide autour d’Enfant nature, précise Jézabel Amesse. Notre projet a la particularité d’être bien maillé, bien attaché au niveau de toute la région. »
Et les parents sont également de la partie, alors que les intervenantes de l’organisme communautaire Le Réseau d’entraide des Appalaches ont eu l’idée de créer Parenfant nature, qui propose d’explorer la nature en famille. « C’est une des visées d’Enfant nature d’intégrer les parents et nous voulons aller encore plus loin en proposant les livres d’histoires d’Enfant nature aux parents, confie Sylvie Gervais. Ces histoires, qui mettent en scène des animaux de la faune québécoise, proposent des activités que les parents pourront faire pour poursuivre l’aventure et les apprentissages de leur enfant à la maison. »
Pour assurer une implantation maximale de l’approche Enfant nature et la pérennité du projet, Jézabel Amesse anime un comité des partenaires qui regroupe le Centre de services scolaire, le Bureau coordonnateur des Appalaches qui supervise les services de garde en milieu familial, les trois grands CPE de la région et un organisme communautaire. Une communauté des pédagogues Enfant nature s’est également formée pour accompagner les éducatrices et les enseignantes et développer les meilleures pratiques.
Désireuse d’assurer le développement optimal de ses enfants, c’est finalement toute une collectivité qui se reconnecte avec la nature et le bonheur du plein air. « On travaille à la base quelque chose qui va émerger au sein de toute la MRC, conclut Jézabel Amesse. Il y a un effet domino qui donne beaucoup d’espoir pour l’avenir. »
Un effet domino qui commence déjà à se faire sentir, puisqu'un autre projet pilote est en cours, cette fois-ci en lien avec le projet ALEX de l'AQCPE. C'est donc une histoire à suivre...
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